La Valeur d’une oeuvre d’art.

Le prix d’une oeuvre d’Art et la valeur esthétique?

Quels sont les liens entre l’art et l’argent ?

C’est une question d’actualité importante.
Des oeuvres, parfois médiocres simulacres d’œuvres célèbres se vendent très cher et d’autres de grand intérêt restent sans valeur. Ces œuvres là de qualité et appréciées restent sans visibilité et semblent condamnées alors qu’une représentation médiocre par exemple deviendra une valeur cotée en Bourse.

Jean Joseph GOUX a publié un essai « l’art et l’argent ». Cet article s’inspire de réflexions  à ce propos.

Historiquement, ce rapport art et argent apparait au 19 éme siècle dans les réflexions d’écrivains  à l’époque des impressionnistes. Zola surtout mais aussi Mallarmé ou Huysmans ont analysé ce problème qui se produisait dans le marché de l’art  et ils observaient un passage d’une forme de marché à une autre forme. Le sens de la valeur esthétique et économique est modifié.
Dès ce moment la valeur d’un objet ou d’une toile est Boursière. Nous sommes devant le problème actuel et la valeur économique d’une oeuvre n’est plus stable et surtout ne se fait pas en fonction de critères reconnus comme le beau, le fini, le ressemblant ou l’édifiant. Non il ne s’agit pas de cela.

Marchands et acheteurs  n’ont pas ou peu de connaissances de l’art  mais il gèrent un porte feuille de valeurs boursières. Actuellement ce phénomène s’est amplifié et il conduit à des dérives générales sur les pratiques artistiques. En art il n’y a plus de critères d’appréciation et même il ne s’agit plus d’art. Seul le jeu de pratiques boursières est important pour amener n’importe quoi à des cotations vertigineuses.

Cela conduit à des référencements importants et à des conservations onéreuses dans les musées d’œuvres qui finalement ont peu à voir avec l’art que le musée conserve habituellement.
Zola dans « l’œuvre » parle déjà de tout cela ». Dès l’époque impressionniste se pose déjà la question de la valeur-travail dans les tableaux. Le client est un peu réticent à acheter un Monet ou un Sisley car il trouve le travail insuffisant et proche d’une improvisation facile. Et il ne voit que travail bâclé dans les toiles impressionnistes. Le peintre lui même fuit cette valeur travail comme étant celle d’un ouvrier académique d’un artisan laborieux sans initiative.
C’est donc bien la question de l’importance du travail qui est au cœur du débat pour le peintre comme pour le client.

Les impressionnistes désiraient seulement se libérer des contraintes académiques  pour obtenir un autre effet, celui de la liberté de l’improvisation et de l’inachèvement à l’encontre du léché flasque. Et dans ce cas le travail réel se cache derrière la spontanéité. On comprend bien cela lorsque l’on regarde des oeuvres de maîtres anciens : les ébauches, les esquisses de Léonard à Gustave Moreau qui collectionnait ses macules et palettes colorées tout en travaillant sans relâche à son Jupiter et Thétis.

Actuellement la valeur travail est abandonnée au profit d’un point de vue subjectif et c’est l’acheteur (et non le créateur) qui est la source de la valeur. Il y a maintenant un renversement des rapports entre valeur esthétique et valeur économique. C’est le prix qui est un critère de la valeur esthétique.

D’autre part Joseph Goux décrit la variabilité du jugement sur la valeur esthétique, c’est à dire que les cotes se font et se défont comme les valeurs boursières. Et les collectionneurs suivent ce papillonnement qui est suivi par le musée qui a tendance à stabiliser. Il y a un comportement moutonnier à la Bourse et il en va de même pour le marché de l’art. Et cette tendance moutonnière est la cause de réévaluations à la hausse ou à la baisse. Comme par exemple la réévaluation de la peinture dite académique (Gérôme .. Cabanel)

(Joseph Goux parle aussi de Nietzsche et de ses réflexions sur la notion de valeurs. Ce qui est intéressant c’est qu’il établit un parallèle entre la mise en cause par Nietzsche et la critique des  notions de valeur par Tzara et les dadaïstes. Il y a chez les deux un appel à la subjectivité individuelle plutôt qu’à une esthétique dominante.
Dans ses manifestes Tzara précipite le mouvement de dévalorisation des valeurs et il met en causes les notions de beauté de vérité et tout ce qui peut évoquer une transcendance supérieure. Dans les manifestes Tzara ravale les valeurs hautes , l’art , l’artiste , à des valeurs basses.)

Le cas de l’acheteur qui ne connait rien de l’art est déjà suggéré par Zola lorsqu’il évoque le fait que le tableau n’est rien d’autre qu’une marchandise que l’on stocke en attendant de la vendre quand sa cote s’élève.
Le tableau est comme du cacao, du sucre, du cuivre ou du pétrole et il n’est qu’un support de spéculation. (il n’est pas fait pour être admiré, étudié, médité mais pour être entre les mains de courtiers ou de gestionnaires)
Cependant dans certains cas et c’est paradoxal, ces pratiques économiques  qui ravalent l’art au statut de matière quelconque, en même temps, elles apportent à l’art un hommage involontaire qui est alors considéré comme un trésor.

R.Dumoux
www.viapictura.com

N.B
La valeur d’une oeuvre d’art?  : valeur esthétique ou valeur économique? ?
– A priori la valeur esthétique existe selon certaines évaluations. En soi elle est durable contrairement à la valeur économique qui semble plus fluctuante.
Pour perdurer de façon visible la valeur esthétique doit être soutenue par la valeur économique..
Sans la présence de la valeur économique, cette valeur esthétique d’une oeuvre n’est pas protégée et avec le temps l’œuvre abandonnée à elle même, se dégrade et va à sa destruction. De multiples oeuvres qui paraissent parfois comme des trésors sont ainsi promises à la ruine si elles ne bénéficient d’aucune protection.