L’atelier de Raphaël

Image à la une : Dessin – R. Dumoux © viapictura.com

L’ATELIER de RAPHAËL

On connait la biographie de Raphaël, d’Urbino à Florence et ensuite la conquête de Rome. A Rome il participe à la décoration des appartements du pape Jules II. Il va représenter sous forme d’allégories les domaines de la Connaissance : la Théologie, la Poésie, la Jurisprudence. La 1ère scène peinte sera l’école d’Athènes le plus célèbre symbole de la Renaissance italienne. En 1511 il commence le décor de la chambre d’Héliodore. Il y a là un programme iconographique avec des scènes historiques montrant l’intervention divine en faveur de l’Église. Par exemple la rencontre du pape Léon 1er et d’Attila.

A ce moment les surfaces à couvrir sont importantes et les délais parfois brefs. Alors Raphaël doit s’organiser et il va créer un atelier avec des assistants.
Comment fonctionne cet atelier? Tout d’abord Raphaël se réserve l’invention des scènes, les figures,les compositions et les détails. Également il intervient à la fin du travail des apprentis pour corriger achever les visages par exemple ou des lumières ou contrastes plus personnels. Les assistants réalisent les cartons  à partir des dessins du maître,  ils les reportent sur le mur et participent aussi à l’exécution mais sous le contrôle du maître.

En 1515 le pape Léon X lui commande l’illustre « incendie du Bourg. » et puis en 1516 il est chargé d’exécuter 10 grands cartons (qu’il réalisera  seul)  de tapisserie des Actes des apôtres et le pape lui demande aussi de veiller à la conservation des monuments antiques, en faisant des relevés. Travail considérable qui oblige Raphaël à déléguer une grande partie de son travail à l’atelier. Raphaël doit également répondre à la demande de retables et de portraits.

L’organisation de l’Atelier de Raphaël.
Vers 1513 l’atelier de Raphaël prend une grande envergure. Il ne travaille jamais sans aide. Ses assistants préparent les toiles et panneaux font les couches préparatoires d’encollages et de préparations, et toutes les taches nécessaires à l’élaboration de l’œuvre, telles que les agrandissements. Et même à la fin de la période romaine ils contribuent à la conception et à l’exécution.

Les deux principaux  assistants sont Giulio Romano et Gianfrancesco Penni. A la mort du Maître ils seront les principaux héritiers de l’atelier et des biens. Ils poursuivront les œuvres inachevées et répondent aux commandes et contrats. Après la mort de Raphaël, Romano et Penni laissent apparaitre des qualités personnelles, une personnalité.
Il y eut une entente exceptionnelle entre ces assistants et Raphaël. Le maître semble céder la place à Penni pour les modelli et cartons : il esquisse l’idée de la composition fait les croquis en sanguine ou à la pierre noire, puis l’assistant les met au propre : il traduit les inventions et cet assistant, brille par sa maîtrise. C’est le cas de l’illustre Grand St Michel : le modello est de Penni.

De  cette grande et riche proximité  dans le travail  entre le maître et ses assistants, va naître un style d’atelier. Romano et Penni sont cités conjointement dans divers documents de commandes ou de réalisations.

La production de l’atelier est très homogène et Raphaël fait très souvent référence à ses assistants. On laisse entendre que les trois artistes sont les auteurs  d’un même style comme d’une seule main.
Mais parfois telle commande montre que Raphaël s’est très impliqué  dans l’exécution.
On comprend ainsi qu’il y a là un paradoxe, une contradiction entre la notion de style d’atelier et la pratique unique qui valorise la seule main d’un créateur.

Ce développement de l’atelier de Raphaël est du à la demande pressante mais pour Raphaël il est aussi consécutif à une vue de l’esprit. C’est à dire que Raphaël critique la délégation du travail et met l’accent sur la conception originale plutôt que sur la notion de l’exécution.
Ce fonctionnement de l’atelier où le maître délègue la réalisation aux assistants, ne se chargeant que de la conception, cela fait penser aux pratiques de l’art industriel de nos jours.
On peut presque penser aux réalisations de Jeff Koons ou encore aux énormes pièces d’usine de Richard  Serra. En effet toutes ces pratiques recherchées actuellement sont opposées aux idées dites post Renaissance, de toute façon opposées à la réalisation de l’œuvre originale personnelle.
Cependant ces œuvres énormes et de grand coût bien qu’impersonnelles ont droit d’existence mais elles ne doivent pas rejeter la création personnelle de l’auteur unique.

R.Dumoux
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