La Pensée de l’art dans le blog viapictura

L’ART dans le BLOG VIAPICTURA.

Quelques artiste actuels :
Damien Hirst Jeff Koons. Soulages. Derain. Buren. Vasconcelos. Gloria Friedman. Lavier. Boltanski. Rothko. Mapplethorpe Garouste Bill Viola. Cy  Twonbly. Richter. Tapies. Morellet. Clemente. Penone. Sophie Calle. Basquiat. Cursky. Cindy Scherman. Sigmar Polke.. Serra. Don Judd. Kusama. Anish Kapoor. Kiefer. Boetti. Nam June Paik. Sol Lewitt. Eva Hesse. Kosuth, Bruce Nauman Mona Hatoum. De Kooning. Rachel Witheread. Pipilotti Rist. Fischli et Weiss. Les Peintres de Monochrome : Klein, Malevitch, Rodchenko, Soulages, Buren, Mosset, Toroni Parmentier. Gupta.
Tous aperçus ou vu dans des expositions, biennales ou rétrospectives de grands musées depuis les années 70- 75 jusqu’aux années 2000 et plus.

– Le lecteur assidu de mon blog viapictura a sans doute remarqué que beaucoup de mes notes et références se rapportent aux anciens maîtres, de l’Antiquité  à la Renaissance, aux grands artistes ou miniaturistes du Moyen-Age comme aux chefs d’œuvre de l’antiquité gréco-latine ou encore de  l’Assyrien ou de l’Égypte ; tout un passé jusqu’au  19ème siècle et à Rodin.
Je n’ai pas voulu être exhaustif ni orienter quiconque dans cette seule perspective. Je n’ai fait que citer les sources évidentes sur lesquelles je réfléchis et travaille souvent.
Et les mouvements du 20éme et du début du 21ème siècle demeurent pour moi d’une signification importante quant à l’évolution historique et mondiale de la société.

L’art contemporain actuel peut décevoir et paraitre matériel, manquant d’élévation, intellectuel , incompréhensible. Il n’est pas ce papillon aérien de ¨Psyché » qui virevolte au gré du vent pour nous insuffler une pensée, il a la pesanteur du Diable d’argent sous lequel peine le peuple et à l’aide duquel il écrase de son pied la grâce de la pensée libre et intelligente. Cependant je considère réellement les artistes dits contemporains qui sont en recherche et je vois leurs expositions.

– Je me réfère par exemple au collectif  ART & LANGUAGE (Voir sur le site du centre Pompidou) qui m’assure d’une certaine liberté d’esprit et dans lequel je me retrouve pour quelques uns de mes travaux.
D’ailleurs il semble que le blog Viapictura que je tiens, manifeste un certain nombre des caractéristiques des activités de Art & Language
Je citerai ici à titre d’exemple  quelques uns de mes travaux décrits dans les articles du Blog viapictura. Ils coïncident de près avec les propos de Art & Language.

Art & Language pose la question suivante : « Comment un texte sur l’art pourrait-il être considéré comme une création artistique ?

L’expérience de l’Ekphrasis  me semble t-il permet de répondre affirmativement.

Tel est l’exemple de Mantegna qui a réalisé un tableau : « la Calomnie d’Apelle » tableau ancien (disparu) selon la description de l’historien antique Lucien.

Le texte devient une véritable création : il décrit la composition, les figures, leurs habits, leur époque et leur activité.
« Et verbum factum est ». C’est une phrase biblique qui a été incarnée en art : le verbe, le mot s’est fait chair .

Les textes de Art & Language sont très divers :

– il y a des protocoles qui décrivent des installations ou accrochages d’œuvres existantes ou à réaliser.
– Souvent des textes et lectures à elles seules constituent l’exposition avec une présentation à l’image d’un tableau.
– Il y a des conversations (avec le spectateur parfois)
– On découvre aussi  des  descriptions en tout genre.
– Enfin on lit des textes de critiques d’art ou des emprunts à des artistes ou critiques (Malevitch, par exemple.)

Il est intéressant de comprendre ce qui distingue Art &Language de l’art Conceptuel ;
Depuis Avril 2016, le château de Montsoreau près de Saumur a réalisé une exposition du travail de la collection de Art & Language.
L’art conceptuel apparait comme un dérivé de Art & Language. L’art conceptuel paraissant plus limité et maintenant en fin de parcours, alors que Art & Language est complexe, historique et bien Vivant.

– Dans l’ensemble de mon travail il est permis d’envisager diverses tendances ou réalisations  qui s’apparentent de très près aux travaux de Art & Language.
Je citerai déjà le blog que je tiens depuis 10 ans qui est une compilation de textes historiques et de descriptions de mes travaux réalisés, de descriptions du métier de peindre. Et aussi des sources mythologiques historiques. Avec par exemple la description du mandala et de son rôle.

– Exemple : Les textes de mon Blog fonctionnent comme des Ekphrasis, c’est à dire  réalisant une description complète de chacune de mes toiles de 5 mètres. Texte permettant de la réaliser, sa composition, ses figures, les lieux, paysages et architectures.

Avec cet article je tiens à citer et à honorer les anciens maîtres de l’Art qui m’ont inspiré profondément et pour lesquels je devais essayer de montrer l’élévation par mon travail.

De même que Rubens (si je puis me permettre) a rendu un hommage à Léonard de Vinci  en faisant une copie magistrale de la Cène appelé aussi  » The Last  Super » ) J’ai moi même réalisé en 2017 une copie de la Cène, sous l’angle particulier du coloris avec ses couleurs translucides et superposées. A tempéra. (350 x 200 cm)

Quelques Maîtres anciens vénérés.
Véronèse. Rodin. Tiepolo. Rubens. Mantegna. Durer. Altdorfer. Rembrandt. Fra Angelico.  Carpaccio. Michel Ange. Titien. Le Greco. Velasquez, Jordaens. Grünwald. David. Goya. Praxitèle. Martin Schongauer. Brueghel. Hubert et Jean Van Eyck. Hokusai. Quentin Metsys. Pol de Limbourg. Jean Bourdichon. Jean Haincelin. Jean Fouquet. Phidias. Piranèse. Piero della Francesca… et les autres.. Beatus de Liébana. Duccio et la Maesta. Christine de Pisan…

R. Dumoux
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Actes de vandalisme en Art

La succession ci-dessous d’actes de vandales sur des oeuvres d’art est inspirée d’une exposition organisée par le musée Denon de Chalon sur Saône (France).

Cette exposition relate l’acte de vandalisme en 1991, sur un tableau du 19ème, représentant un homme de couleur attribué à Géricault. Cette oeuvre fut lacérée au cutter en 1991 et à cette époque il y eut une enquête et des articles de presse.

1914 : Agression d’une militante féministe sur une toile de Velázquez : « Vénus au miroir «  Une oeuvre majeure qui fut heureusement sauvée.

– 1911-1975-1990 : succession de 3 actes de vandalisme sur la Ronde de Nuit de Rembrandt.

– 1991 au musée Denon à Chalon sur Saône : toile attribuée à Géricault, lacérée.

– 1993 Nîmes et 2006 à Paris : La Fontaine Richard Mutt de Duchamp fut à deux reprises « complétée » par l’artiste Pinoncelli.
Avignon : une toile de Cy Twombly grand maitre américain, est vandalisée par une touriste qui a déposé un baiser de son rouge à lèvres sur le blanc de la toile. Toile exposée chez Mr Yvon Lambert galeriste à Avignon.
– 2007 Paris Musée d’Orsay : des vandales ivres parviennent à pénétrer dans le musée en forçant une porte du côté des quais de la Seine. Ainsi ils vont lacérer, perforer des toiles de Monet.
– 2009 Paris Le Louvre : La Joconde est agressée à l’aide d’une tasse vide contre la vitre de protection. C’est le fait d’une femme russe.
– 2011 toujours au Louvre un tableau magnifique de Poussin, Le veau d’or, est vandalisé à l’aide d’une bombe rouge.
– 2011 Washington : des toiles de Gauguin et Matisse sont attaquées à coup de poing par un déséquilibré (malade du syndrome de Stendhal)
– 2012 Johannesburg : deux hommes taguent le portrait provoquant d’un dirigeant politique dans « la lance » par Brett Muray artiste Sud Africain. Acte politique.
– 2012 Londres : sur une toile de Rothko fut apposé un nom et une inscription pour protester contre la situation faite à l’art contemporain.
– 2013 Lens : une toile de Delacroix fut vandalisée, apparemment pour raison politique.

Ce petit panorama du vandalisme dans les arts est significatif : c’est une expression de sentiments et de rancoeurs personnelles ou sociales, de la part de personnes et d’artistes le plus souvent isolés.

Cette liberté prise à l’égard des oeuvres présentées dans les musées semble se développer de plus en plus. Il faut cependant relativiser leur importance et se souvenir et revisiter le vandalisme destructeur qui eut toujours lieu au cours de l’histoire et en particulier avec les iconoclasmes, religieux ou politiques et révolutionnaires.

R.Dumoux
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Artistes conceptuels et œuvres actuelles

Image à la une : Préparation-mise en place pour un panneau a tempéra – R. Dumoux – http://www.viapictura.com

ARTISTES CONCEPTUELS ET ŒUVRES ACTUELLES

(Article en écho à un texte de Erik Verhagen) (Art Press déc . 2012)

Les conceptuels ont été illustres dans les années 60 et 70. Dans les années 70 on a pu voir de nombreuses expositions de conceptuels (Anne Darboven, Jan Dibbets ou Robett Filliou par exemple) Et puis ils furent délaissés par la critique et les institutions. Leur travail réapparait maintenant à cause d’oeuvres d’art contemporain de suiveurs en nombre  qui s’en inspirent directement.
On peut louer la volonté et détermination des artistes des années 60- 70. A cette époque on s’est mis à bousculer les idées de l’art moderne abstrait par exemple. En face il y eut de fortes résistances et des incompréhensions. Les artistes à l’époque furent très isolés mais cependant persuadés de l’intérêt de leur travail.

Ces oeuvres actuelles inspirées des démarches des années 60 manquent d’originalité et d’invention. On peut même remarquer souvent qu’il s’agit de travaux d’école, des travaux d’élèves. C’est comme UN ART INFANTILISE. Et en ce sens, souvent, il est fait pour amuser et divertir. On a pu citer pour cela : Jonathan Monk, Cattelan, Abdessemed, Murakami ou Damien Hirst.
Selon Barber : « c’est un « ethos » infantile qui préfère le facile au difficile, le simple au complexe et le rapide au lent »
(L’art conceptuel a préfiguré cette tendance, au moment du capitalisme changeant en proposant des services de sociétés plutôt qu’un produit)

Cette infantilisation de l’art qui définit notre époque sert à des propositions artistiques telles que : le Tobbogan de Carsten Holler ou le travail de Gréaud Loris. On distrait ainsi le public de façon amusante et parfois les manifestations d’art contemporain font penser aux animations de parc d’attraction.
On a pu dire que l’amateur de cet art est un adolescent qui recherche des sensations fortes, des amusements avec ses copains. Ainsi dans ce domaine de l’art il y a une grande variété de jeux possibles, avec des  mouvements de lumières éclatantes, des fumées, des bruits énormes : on est toujours impressionné ou on a peur ou bien on peut se vautrer sur des coussins au sol de façon conviviale pour rêver avec des jeux lumineux aux formes suggestives. Ou bien encore on s’égare dans un labyrinthe de spots lumineux suggérant l’infini, l’espace étoilé..Tout cela est très ludique.

Les artistes actuels ont privilégiés citations et emprunts directs de ces artistes des années 60 et 70. Souvent il s’agit d’une banalisation superficielle de ces oeuvres, un travail médiocre de suiveurs , d’académie.
Cette banalisation est une mode obligatoire à laquelle on n’échappe pas, et elle est soutenue par un marché qui est très demandeur.
Toutes ces oeuvres scolaires et répétitives constituent comme une forêt de broussailles. Ainsi envahi, l’art est devenu incompréhensible sans rapport avec la vérité du monde. Seul l’argent est son maître et commande en grand nombre des productions infantilisantes qui seront appelées à meubler les très nombreux et immenses musées de la planète.
Souvent devant ce travail, me vient à l’esprit l’image de résidus de scénographies où tout est disparate, équivalent.

Mais alors où se cache l’Art ?  là où il y a du travail, du métier, de l’étude difficile, de la lenteur, du temps de l’âge et souvent du manque de soutien.

R.D.
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N.B. Notes étonnantes et réflexions collectées ici où là au cours de lectures de textes sur l’art ou de critiques :

– On cite parfois la nature de « croûtes » des peintures de Gerhardt Richter.
– L’art actuel est une industrie attractive. On utilise de petites propositions plastiques d’école héritées de figures du passé pour réaliser des notoriétés et des transactions financières.
– On a voulu rendre l’art contemporain légitime en disant qu’il fallait l’expliquer. Et Finalement c’est une erreur car il n’y a pas eu de résultat .
– Enfin il faut réhabiliter des valeurs aussi accablantes que le génie, l’inspiration, le talent.
– Lire, étudier l’histoire et s’interroger sans indulgence.

La Valeur d’une oeuvre d’art.

Le prix d’une oeuvre d’Art et la valeur esthétique?

Quels sont les liens entre l’art et l’argent ?

C’est une question d’actualité importante.
Des oeuvres, parfois médiocres simulacres d’œuvres célèbres se vendent très cher et d’autres de grand intérêt restent sans valeur. Ces œuvres là de qualité et appréciées restent sans visibilité et semblent condamnées alors qu’une représentation médiocre par exemple deviendra une valeur cotée en Bourse.

Jean Joseph GOUX a publié un essai « l’art et l’argent ». Cet article s’inspire de réflexions  à ce propos.

Historiquement, ce rapport art et argent apparait au 19 éme siècle dans les réflexions d’écrivains  à l’époque des impressionnistes. Zola surtout mais aussi Mallarmé ou Huysmans ont analysé ce problème qui se produisait dans le marché de l’art  et ils observaient un passage d’une forme de marché à une autre forme. Le sens de la valeur esthétique et économique est modifié.
Dès ce moment la valeur d’un objet ou d’une toile est Boursière. Nous sommes devant le problème actuel et la valeur économique d’une oeuvre n’est plus stable et surtout ne se fait pas en fonction de critères reconnus comme le beau, le fini, le ressemblant ou l’édifiant. Non il ne s’agit pas de cela.

Marchands et acheteurs  n’ont pas ou peu de connaissances de l’art  mais il gèrent un porte feuille de valeurs boursières. Actuellement ce phénomène s’est amplifié et il conduit à des dérives générales sur les pratiques artistiques. En art il n’y a plus de critères d’appréciation et même il ne s’agit plus d’art. Seul le jeu de pratiques boursières est important pour amener n’importe quoi à des cotations vertigineuses.

Cela conduit à des référencements importants et à des conservations onéreuses dans les musées d’œuvres qui finalement ont peu à voir avec l’art que le musée conserve habituellement.
Zola dans « l’œuvre » parle déjà de tout cela ». Dès l’époque impressionniste se pose déjà la question de la valeur-travail dans les tableaux. Le client est un peu réticent à acheter un Monet ou un Sisley car il trouve le travail insuffisant et proche d’une improvisation facile. Et il ne voit que travail bâclé dans les toiles impressionnistes. Le peintre lui même fuit cette valeur travail comme étant celle d’un ouvrier académique d’un artisan laborieux sans initiative.
C’est donc bien la question de l’importance du travail qui est au cœur du débat pour le peintre comme pour le client.

Les impressionnistes désiraient seulement se libérer des contraintes académiques  pour obtenir un autre effet, celui de la liberté de l’improvisation et de l’inachèvement à l’encontre du léché flasque. Et dans ce cas le travail réel se cache derrière la spontanéité. On comprend bien cela lorsque l’on regarde des oeuvres de maîtres anciens : les ébauches, les esquisses de Léonard à Gustave Moreau qui collectionnait ses macules et palettes colorées tout en travaillant sans relâche à son Jupiter et Thétis.

Actuellement la valeur travail est abandonnée au profit d’un point de vue subjectif et c’est l’acheteur (et non le créateur) qui est la source de la valeur. Il y a maintenant un renversement des rapports entre valeur esthétique et valeur économique. C’est le prix qui est un critère de la valeur esthétique.

D’autre part Joseph Goux décrit la variabilité du jugement sur la valeur esthétique, c’est à dire que les cotes se font et se défont comme les valeurs boursières. Et les collectionneurs suivent ce papillonnement qui est suivi par le musée qui a tendance à stabiliser. Il y a un comportement moutonnier à la Bourse et il en va de même pour le marché de l’art. Et cette tendance moutonnière est la cause de réévaluations à la hausse ou à la baisse. Comme par exemple la réévaluation de la peinture dite académique (Gérôme .. Cabanel)

(Joseph Goux parle aussi de Nietzsche et de ses réflexions sur la notion de valeurs. Ce qui est intéressant c’est qu’il établit un parallèle entre la mise en cause par Nietzsche et la critique des  notions de valeur par Tzara et les dadaïstes. Il y a chez les deux un appel à la subjectivité individuelle plutôt qu’à une esthétique dominante.
Dans ses manifestes Tzara précipite le mouvement de dévalorisation des valeurs et il met en causes les notions de beauté de vérité et tout ce qui peut évoquer une transcendance supérieure. Dans les manifestes Tzara ravale les valeurs hautes , l’art , l’artiste , à des valeurs basses.)

Le cas de l’acheteur qui ne connait rien de l’art est déjà suggéré par Zola lorsqu’il évoque le fait que le tableau n’est rien d’autre qu’une marchandise que l’on stocke en attendant de la vendre quand sa cote s’élève.
Le tableau est comme du cacao, du sucre, du cuivre ou du pétrole et il n’est qu’un support de spéculation. (il n’est pas fait pour être admiré, étudié, médité mais pour être entre les mains de courtiers ou de gestionnaires)
Cependant dans certains cas et c’est paradoxal, ces pratiques économiques  qui ravalent l’art au statut de matière quelconque, en même temps, elles apportent à l’art un hommage involontaire qui est alors considéré comme un trésor.

R.Dumoux
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N.B
La valeur d’une oeuvre d’art?  : valeur esthétique ou valeur économique? ?
– A priori la valeur esthétique existe selon certaines évaluations. En soi elle est durable contrairement à la valeur économique qui semble plus fluctuante.
Pour perdurer de façon visible la valeur esthétique doit être soutenue par la valeur économique..
Sans la présence de la valeur économique, cette valeur esthétique d’une oeuvre n’est pas protégée et avec le temps l’œuvre abandonnée à elle même, se dégrade et va à sa destruction. De multiples oeuvres qui paraissent parfois comme des trésors sont ainsi promises à la ruine si elles ne bénéficient d’aucune protection.

Art et Argent. Réponse

Extrait d’un commentaire sur l’article  » l’art et l’argent » du blog viapictura :

« je faisais des recherches sommaires sur les descriptions d’œuvres perdues d’Apelle, et je suis tombée sur votre blog. Peut-être n’attendiez vous pas de réponses à cet article, mais j’ai bien envie de réagir. Je pense comme vous que, en effet, les différentes crises, qu’elles fussent culturelles, politiques ou sociales, ont fait des ravages dans l’histoire de l’art. Comme vous le soulignez très justement, « Où sont les toiles de Zeuxis, d’Apelle de Pharasios? » Je vis à Bordeaux, et lorsque cette ville a reçu des fonds importants pour être restaurée, beaucoup ont polémiqué en critiquant que l’argent partait dans des choses inutiles et qu’il valait mieux le consacrer à des logements sociaux par exemple. Mais il me semble que la défense du patrimoine culturel est quelque chose de vital. Nous n’avons pas à laisser péricliter une œuvre avec pour argument que c’est une dépense inutile. L’art fait partie de notre histoire autant que les textes littéraires, que les discours politiques. Autant que l’Histoire. Détruire une œuvre n’arrangera pas les problèmes, mais les protéger peut nous permettre de nous souvenir de notre passé, de ces différents courants de pensées qui se sont entrecroisé au cour des siècles. L’art est un témoignage historique très important et dans quelques années, je suis sûre qu’un Historien de l’art, sociologue de l’art ou autre analysera les cours du marché de l’art bien plus objectivement que nous aujourd’hui et expliquera (peut-être) ce phénomène. »

En réponse à ce commentaire :

Après relecture de mon article du blog viapictura, à propos de l’art et l’argent, je suis étonné de constater une incompréhension de mon texte.
Cette allusion à « mon adhésion implicite à la destruction ou à la non protection du patrimoine » n’a pas de sens pour moi  et ne ressemble en rien à mon travail  (bien sûr, passé sous silence ici)
Cela en fait constitue pour moi une méprise. D’autant que je suis un conservateur et un collectionneur, un compilateur impénitent.
Tout mon travail est axé sur cette recherche de la transmission, de la protection d’une connaissance et de la valorisation d’un patrimoine.
Il suffit pour cela d’ouvrir une page du site viapictura .

                          Inutile de polémiquer. Les œuvres existent.

                          Certaines sont très protégées d’autres ne le sont pas, qu’il s’agisse de chefs d’œuvre ou de productions « moyennes ». (Je n’ai pas exprimé d’opinion sur des œuvres mal considérées parfois.)

                         Le sens de cet article était de montrer que l’œuvre d’art quel que soit son âge, son volume ou sa qualité, est menacée de par la nature des choses.
C’est une simple constatation contre laquelle nous luttons  dans la mesure de nos moyens.

                         D’autres exemples peuvent animer cette réflexion:

                        – Les Bouddhas de Bandama ont résisté à une nouvelle explosion.
Il y a déjà 7 ans les talibans ont détruit en partie ces colossales et merveilleuses statues de bouddha. Une perte immense pour le patrimoine de l’humanité et que l’on essaie de consolider en rassemblent les débris des statues ( pour essayer de les reconstituer) et en protégeant les admirables et immenses fresques qui ornent les niches abritant les bouddhas.
Nouvel incident sans gravité cependant : à l’occasion d’une opération de neutralisation d’obus, les troupes de l’OTAN ont fait exploser 2 obus près de la plus petite des statues. Heureusement on a assuré qu’aucun dégât n’a été causé à ces chefs d’œuvre.
Cet exemple prouve la « fragilité » des monuments les plus imposants et nous demande de rester vigilants.

                       – Autre exemple pris dans l’art actuel et relatif au sculpteur Richard Serra.
Le musée Reina Sofia de Madrid a tout simplement perdu une œuvre de Serra : il s’agit d’une œuvre énorme de plusieurs tonnes, acquise à grand prix .
L’œuvre est portée disparue !
Autre œuvre de Serra touchée : « Title Arc »  à New York, pièce de 4 mètres x 36 de long, est déplacée et découpée en morceaux et disparaît définitivement.

                      – Récemment, des voleurs de métaux ont opéré dans le midi pour démolir et faire disparaître des statues imposantes de Kiefer.

Tout cela est l’indice de la fragilité de notre condition et de nos constructions.
Telle est la signification de l’article « art et politique » commenté par ce lecteur.
(Autre exemple de fragilité :  dans mon travail, les  35 toiles de 5 mètres x 3 mètres du Pictorama  sont  menacées de destruction par les poussières, les entassements , les rats et autres avaries, si rien ni personne ne s’en préoccupe !)

Avec cette idée de la fatalité qui cause la disparition de certaines œuvres d’art, nous sommes très loin, à l’opposé, des affirmations erronées de ce lecteur.

R.Dumoux
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L’art et l’argent

Image à la une : La calomnie d’Apelle – Sandro Botticelli


Extrait d’un article de Beaux Arts Magazine à propos de l’argent des artistes :

« Tandis que le prix des œuvres flambe, que les acheteurs sont insatiables et que l’argent coule à flot dans l’art contemporain, on se demande  ce que les artistes font de ce pactole. »

Parfois la réponse est qu’ils collectionnent des œuvres d’art.

(il s’agit de sommes considérables et les exemples sont nombreux, de plus en plus d’ailleurs.)

Bravo pour ces artistes qui voient ainsi leur œuvre collectionnée et protégée par le système.


On peut se questionner au sujet de l’argent dans le monde de l’art.

– Comment est-on arrivé à ce fait que certaines œuvres (qui n’ont rien d’exceptionnel, semble-t-il) parviennent à égaler, sur ce terrain de l’argent et de la conservation, le niveau des grandes œuvres illustres de toute l’histoire de l’art ?

– Pourquoi d’autres œuvres d’artistes confirmés,  sont-elles totalement dépréciées, non vues, cachées ?

– Pourquoi ces œuvres fussent-elles inclassables et de grande qualité se voient ainsi exposées aux pires sévices et peut-être à la destruction finale ?


– Est-ce la valeur-argent qui fait la valeur de l’œuvre?

Je n’apporterai pas de réponse à ces dilemmes : la Providence et le Temps s’en chargeront.

Dans certains cas d’œuvres du passé,  la sauvegarde a été miraculeuse.
Chacun connaît la Tapisserie d’Angers, travail panoramique important.
Ces tapisseries ont survécu, bien qu’à une période de l’histoire, certaines d’entre elles aient servi au rembourrage des bas-flancs dans les écuries de chevaux.

Comment les extraordinaires portraits Égyptiens du Fayoum (Louvre) sont-ils parvenus presque intacts jusqu’à nous après 3000 ans ?

Mais, combien de chef d’œuvres détruits au moment de la querelle iconoclaste ! Combien de retables, d’icônes, de sculptures polychromes et travaillées à l’or ont brûlé sur des bûchers!

Combien de fresques ou sculptures décapitées à la Révolution!

Où sont les toiles de Zeuxis, d’Apelle de Pharasios ?
Que sont devenus ces chefs d’œuvres impérissables que les artistes de la Renaissance ont tenté de recréer à partir des textes des historiens antiques ?

Un exemple célèbre est « la calomnie d’Apelle » de Botticelli : le sujet extraordinaire et insolite de cette œuvre est issu d’une source classique : c’est la description d’un tableau célèbre d’Apelle faite par l’écrivain Lucien, représentant  la Calomnie, tableau disparu.
Tous les personnages  symboliques sont réalisés à partir du texte antique: l’Ignorance, la Fraude, le Soupçon, l’Envie, qui traînent le Calomnié devant le roi Midas pour qu’il soit jugé devant la Pénitence et la Vérité nue.
Botticelli a recréé non seulement les protagonistes de cette action mais aussi les bas-reliefs et et les statues ornant la salle du trône, à partir de la description littéraire de Lucien.

Sandro_Botticelli_021-2


 Toutes ces questions engendrent la mélancolie sur le Temps qui passe, sur les effets du hasard et la relativité, la fragilité de toute chose.

(Cela fut l’occasion de réaliser dans mon travail une série de tableaux a tempéra inspirés de Chronos. S’y déploient les divinités antiques,  les livres poussiéreux, les racines qui ruinent les architectures, l’accumulation des richesses, le tout dominé par la figure du Temps avec ses ailes et sa faux.. )

En définitive, c’est à nouveau l’esprit des vanités qui apparaît, relativement à la petitesse de notre condition.

Nous sommes soumis aux aléas du hasard si bien que des œuvres actuelles considérées comme médiocres  par certains ont autant de chance de survivre au pinacle de la célébrité et de la valeur d’argent, que le meilleur tableau ou la plus chryséléphantine des sculptures.

Enfin, il est permis de penser que des œuvres superbes mais cachées s’imposent au fil des ans comme majeures et effacent le souvenir de ce qui est maintenant adulé.

R.Dumoux
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L’art et la politique. A propos de Carpaccio

L’art et la « chose publique »… suivi de « à propos de Carpaccio »

Carpaccio, de droite ou de gauche ?

Mantegna, d’extrême droite ?

David, royaliste, révolutionnaire ou simplement exilé à Bruxelles ?

Goya, de gauche ? avec ses tapisseries de style 18ème.

On se pose des questions sur  ces étiquettes contemporaines. Inutilement.

Et finalement on se prend à contempler et à méditer sans fin sur ces œuvres exceptionnelles et intemporelles et le débat sur la « politique » est souvent clos.
Et il faut parler et expliquer ces œuvres.


Carpaccio a peint des tableaux a tempéra comme Mantegna et aussi, des grandes toiles de 5 mètres. Elles relatent l’histoire de Sainte Ursule dans des scènes descriptives et narratives que chacun peut comprendre.

La composition est équilibrée et recherchée; le dessin est naturaliste; le  grand métier de la peinture est parfait. Les scènes sont édifiantes et décrivent des actions religieuses ou bien d’une pensée élevée.

Ste_Ursule_2_CarpaccioLa rencontre avec le Pape – légende de Sainte Ursule – Vittore Carpaccio 1493

                                  

Un exemple de grand tableau a tempéra: « Saint Georges combattant le Dragon » :
C’est un tableau de 1 m 50 x 3 m 60 :

CarpaccioStGDragon

Georges arrive en Cappadoce et dans la ville de Séléné sévit un horrible fléau du à la voracité d’un dragon auquel les habitants devaient chaque jour offrir une victime tiré au sort. Et ce jour le sort était tombé sur la fille du roi Aïa :
Cette dernière fut abandonnée, pour ce sacrifice au dragon, près d’un lac proche de la ville. Georges réussit à blesser le dragon et à le faire prisonnier.

Cette toile est un reflet nostalgique de l’époque de la chevalerie disparue.
A Venise il y avait un goût  très répandu pour les romans français du Roi Arthur du 12 et 13éme siècle et Carpaccio a pu s’inspirer directement de certaines gravures.

Carpaccio peint Saint Georges, car il représente l’archétype du militantisme armé au service de la foi, exemple éminent dans ce monde occidental menacé.


La technique de Carpaccio

L’histoire de Sainte Ursule, par exemple, est peinte sur des grandes toiles de 5 mètres (appelées teleri).
Carpaccio prépare son support à base de plâtre et de colle de peau.
Puis il ébauche à l’aide d’une tempéra mista en couches très minces, qui déjà créent une trame  dense (avant l’exécution finale plus colorée et saturée)

Dans ses grandes toiles comme dans ses panneaux, la structure graphique est très présente. (Par exemple on peut lire en transparence, le dessin complet de St Georges combattant le dragon.) Carpaccio accorde une priorité au dessin qui  va lui permettre de créer sa poétique.
Chaque tableau semble né d’un travail long et patient basé sur des dessins très nombreux.
On note le caractère fondamental de ces dessins comme recherche préliminaire.
On peut penser que le répertoire de Carpaccio est un réservoir de pièces fixes que l’on peut emboîter et distribuer dans de nouvelles structures.
Carpaccio perfectionne une pratique du dessin issue de Bellini en observant les grandes peintures narratives des chantiers.


Où situer ce peintre ?

On pourrait répondre à cela en parlant des sources de Carpaccio.

Ses références sont souvent littéraires et poétiques:
les bas reliefs et ornementations classiques, les inscriptions hébraïques, les sujets de chevalerie et les romans courtois, Pisanello, Boccace, les métamorphoses d’Ovide, les triomphes de Pétrarque, l’astrologie, les livres d’heures.
(lesquels feront sans doute l’objet d’article)

R.Dumoux
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Les Vanités contemporaines (art.3)

Image à la Une : Wim Delvoye, Cloaca, 2000

Plusieurs aspects peuvent être distingués dans les vanités contemporaines.

–  Les vanités secondes : c’est à dire qu’elles ne se limitent pas seulement à la représentation d’un crâne ou d’un sablier.
Ce sont des allégories telles la « sculpture morte » de Duchamp : c’est une sculpture tête faite de légumes, fruits, insectes, sorte de remake d’Arcimboldo. Pour Duchamp, c’est une sorte de maniérisme second utilisant les caractéristiques du ready-made. Ce sont des vanités secondes car la mort est présente mais en second plan comme neutralisée..

Marcel Duchamp - "Sculpture morte"
Marcel Duchamp – « Sculpture morte »

Vanités secondes dans l’œuvre de Warhol : des crânes il fait un papier mural et il supprime par la reproduction sérielle, la présence immédiate de l’image.

Vanité secondes chez Richter : pour lui, les vanités sont en surface avec le sans style et la non-couleur. Dans ses miroirs on ne voit rien et ils  sont comme des monochromes.



– Les  vanités à base de décompositions florales et post-organiques.
C’est la figuration de l’éphémère des fleurs et des fruits; ce sont des décompositions qui respirent le flétri et le pourri : fruits, fleurs et petits riens demeurent les métaphores du temps et de la beauté vouée à la disparition.
Un exemple est la boule de 3333 roses de James Lee Byar, qui se fanent au cours de l’exposition.

Telles sont aussi les fleurs immenses de Giorgia d’O’Keeffe vues dans leurs flétrissures ou bien menacées par une tête de mort. Egalement les fleurs d’Araki aux plis et déplis sexués.
De même Michel Blazy fait souvent état d’organismes végétaux qui se transforment.

Les vanités cristallines se rapportent aux effets du verre ou du cristal. Le temps glisse dans des aspects impermanents et se réfléchit dans les images des miroirs.

Par exemple Valérie Belin photographie des miroirs et encadrements de cristal ou des objets de cristal très agrandis. Jean Michel Othoniel créé un rêve de verre : ce sont de minuscules figurines dans des architectures de verre. C’est comme un cabinet de curiosités avec des sirènes, des monstres et hybrides.

Jean Michel Othoniel
Jean Michel Othoniel

L’artiste, Marc Quinn, créé de vraies fausse serres de fleurs : 100 espèces florales sont suspendues et gelées dans le silicone. Ces fleurs sont éphémères mais immortalisées.

– Les vanités comiques sont un autre regard sur la finitude de l’homme et sur l’inanité des richesses du monde. Les oeuvres vues précédemment sont d’un aspect mélancolique ou méditatif.
Les vanités comiques sont humoristique grotesque et ironique. Déjà au Moyen Age il y avait de nombreuses représentations qui présentaient une verve comique comme dans l’oeuvre de Jérôme Bosch.
Dans les marges des manuscrits religieux, on trouve des croquis vulgaires voir scatologiques qui décrivent la vérité d’un corps. L’effroi et le comique se mélangent dans les danses macabres.
L’artiste anglais Damien Hirst, actualise ces archétypes de vanités. Par exemple il photographie son visage souriant avec une véritable tête de cadavre.

Plusieurs artistes actuels utilisent la vanité comique comme mode d’expression avec une volonté de provocation et de scandale.
Wim Delvoye, Maurizio Catelan, Alain Séchas sont des exemples de comique et d’évocation de la mort.
A Messager, R Gober, S Fleury ou encore Dietman, Mike Kelley travaillent dans ce sens  et sont des héritiers du surréalisme  ou de Dada. Ils  sont dans la lignée de »Torture Morte » ou « Sculpture morte » de Duchamp.
Citons seulement de Catelan : le pape foudroyé, cheval mort, ou enfants  suspendus dans les arbres.

– Il y a encore les vanités comiques de répulsion. C’est une vision dégradante de l’homme qui sert à exalter la morale  et amorce la rédemption.
Robert Morris met en scène une communauté de squelettes casqués et peints chevauchant des missiles.
Mike Kelley dans des installations macabres met en scène la nourriture, la sexualité et la  mort. pour cela il se réfère aux films d’horreur, au porno ou à la science Fiction.
Xavier Veilhan qui créé des poufs en forme de crânes, est à mi-chemin, entre le design et la sculpture.

– Un thème important de la  vanité est celui du corps et de le corruption de la vie. Il s’agit de la nature charnelle de l’homme soumise à la décrépitude et à la maladie.
Un exemple caractéristique est celui de Cloaca de Wim Delvoye.
Delvoye a créé un robot (une sorte de machine qui mesure plusieurs mètres et semble représenter tout le système digestif) avec l’aide de scientifiques : il se nourrit comme l’homme et digère complètement.
Cela fait penser à la verve irrévérencieuse des moines du Moyen Age qui rappelaient la bassesse des conditions charnelles pour inviter à l’humilité.
Mona Hatoum explore l’intérieur du corps et en projette les vidéos.

Le monde des objets et des natures mortes dans l’art actuel met en avant la sur-valorisation des objets et biens matériels, montrant ainsi l’opulence de façon burlesque.

Jeff Koons fait en bronze ou en métal étincelant des agrandissements d’objets prosaïques, bibelot ou lapin gonflable.

– Le thème de la nourriture qui est essentiel dans les vanités se retrouve dans le pop art :
hamburger géant de Rosenquist et Wesselman; côtelette en acier d’Oldenbourg ; accumulation de nourriture d’Erro.


Tels sont divers aspects des Vanités : c’est une comédie de la vanité sous l’angle de l’humour et de l’ironie.
On manie l’irrévérence et et le comique. L’hyperbole, la bouffonnerie, la violence d’expression, sont des caractères constitutifs de la création contemporaine manifestée dans ces vanités. Conjuration de la faillite des utopies et désenchantement: c’est l’expression d’un monde qui vit sans Dieu et qui est purement humain voué au comique et à la dérision.

R.Dumoux
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